Gabon : Le gouvernement doit assurer la viabilité économique des entreprises de presse privée

LIBREVILLE (Equateur) – La journée mondiale de la liberté de la presse sera célébrée ce lundi 3 mai 2021 sous le thème : « L’information comme bien public ». Certes, c’est une invite à rendre l’information accessible à tous, mais c’est aussi une interpellation des organismes internationaux, pour amener les gouvernements à assurer la viabilité économique des entreprises de presse souvent dépourvues de tous moyens de subsistance, alors qu’elles contribuent fortement à l’éclosion de l’expression démocratique.

 

 

Les entreprises de presse privée du Gabon souffrent, du moins la grande majorité. Le déficit criard des moyens de subsistance en est la principale raison. Créer pour informer et éduquer les populations, contribuer à l’expression démocratique et accompagner les autorités gabonaises dans le relai médiatique de leurs différentes activités, les médias privés peinent à fonctionner. La subvention d’aide à la presse mise en place par le défunt président de la République, Omar Bongo Ondimba, et qu’ils perçoivent chaque année, est dérisoire pour leur permettre de vivre ou de régler leurs différentes charges.

 

 

L’an dernier par exemple, c’est moins de 100 millions de FCFA que les entreprises de presse privée légalement constituées, ont dû se partager. Soit un montant de 1 à 3 millions de FCFA chacun. Une cagnotte qui est loin de leur permettre de fonctionner toute une année et de régler leurs nombreuses charges.

 

 

Aussi, cette 30ème journée mondiale de la liberté de la presse, est une occasion pour les entreprises de presse privée d’interpeller le gouvernement via le ministre d’Etat en charge de la Communication, Edgard Anicet Mboumbou Miyakou, sur la nécessité de trouver ensemble des mécanismes pouvant les aider à vivre, afin de continuer à jouer pleinement leur rôle au même titre que leurs confrères du secteur public.

 

 

Parlant des médias publics, ils sont également subventionnés par l’Etat gabonais. A la seule différence qu’ils perçoivent chaque année des centaines de millions de FCFA chacun, là où un média privé ne touche que 2 à 3 millions de FCFA. Mieux, en plus d’une subvention conséquente pour leur fonctionnement, les médias publics bénéficient également de la Redevance audiovisuelle et cinématographique (RAC) pour l’investissement.

 

 

Une manne que le gouvernement aurait pu étendre aux entreprises de presse privée, au regard du montant insignifiant de la subvention qu’elles perçoivent chaque année. D’ailleurs, plusieurs patrons de médias privés ont déjà mis la clé sous le paillasson, car ne pouvant assurer les charges inhérentes à leur fonctionnement. Les plus téméraires ont dû réduire leur régime, notamment en se séparant de certains collaborateurs ou en fermant leurs sièges qu’ils n’arrivent plus à payer, pour travailler à domicile.

 

 

Hormis la difficulté du montant de la subvention d’aide à la presse, les entreprises de presse privée doivent également faire face à l’inaccessibilité à la publicité. Ce n’est un secret pour personne, que le marché publicitaire au Gabon, est la propriété d’un groupe qui détiendrait 85% du marché au bénéfice d’un seul média dont nous nous gardons de citer le nom. Les 15% restants sont repartis entre la Municipalité de Libreville et quelques médias.

 

 

Une cartographie qui porte gravement atteinte à la viabilité économique des médias privés du Gabon. Les quelques sociétés citoyennes comme Sobraga, Olam et Setrag pour ne citer que celles-là, ne sont pas accessibles à tous les médias privés. Or, ce problème ne devrait pas se poser, si le Gabon disposait d’une agence publique de régulation de la publicité.

 

 

Elle permettrait à tous les médias qui rempliraient certains critères, d’être éligibles pour recevoir les insertions publicitaires et autres communiqués des entreprises installées sur le territoire national. Des millions de FCFA qui leur permettraient de fonctionnement de manière optimale, sans attendre la subvention d’aide à la presse, et sans se laisser manipuler par certains politiques.

 

 

Parmi les critères d’éligibilité, on pourrait avoir l’existence légale (fiche circuit), l’autorisation de paraitre délivrée par le Ministère de la Communication (agrément technique), le quitus des impôts et de la Cnss (qui prouvent qu’elles paient les taxes et a des employés) etc. Malheureusement, le grand lot des publicités est donné à quelques médias privés, exposant les autres à une mort certaine.

 

 

Que pourrait donc faire le ministre d’Etat à la Communication, pour empêcher la disparition des entreprises de presse privée, qui disons-le, contribuent fortement à informer et éduquer les populations, mais aussi à l’expression démocratique ? La première chose, c’est de revoir à la hausse le montant de la subvention d’aide à la presse en tenant compte du nombre de médias légalement constitués et des difficultés inhérentes à leur fonctionnement.

 

 

Ensuite, le Ministère de la Communication pourrait étendre la RAC aux entreprises de presse privée, car eux aussi ont les mêmes difficultés que les médias publics, qui sont au nombre de quatre (IGIS, AGP, Radio Gabon et Gabon 1ère) et qui emploient majoritairement des fonctionnaires payés par l’Etat. Toujours en termes de propositions, Edgard Anicet Mboumbou Miyakou pourrait également proposer au gouvernement la création d’une agence publique de régulation de la publicité, afin de permettre à tous les médias du Gabon d’y avoir accès suivant certains critères d’éligibilité bien évidemment.

 

 

Toutefois, à défaut de prendre en compte ces différentes propositions pour assurer la viabilité économique des médias privés, le gouvernement devrait alors mettre en place le Fonds national de la presse promulgué par les deux chambres du Parlement depuis 2005. Ce Fonds qui prévoit un montant de plus de 500 millions de FCFA n’a toujours pas été mis en œuvre, alors qu’il pourrait aider les entreprises de presse privée à faire face aux difficultés qu’elles rencontrent.

 

 

Ida AYILA   

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