Gabon : Un ministre peut-il suspendre l’indemnité d’un DG ou le salaire d’un agent public ?

LIBREVILLE (Equateur) – La question suscite des interrogations depuis que le ministre de la Santé, Guy Patrick Obiang Ndong, a décidé de suspendre l’indemnité du directeur général du Centre hospitalier régional de Melen (CHRM). D’après un directeur central des ressources humaines (DCRH) qui a requis l’anonymat, la loi 8/91 portant statut général des fonctionnaires le prévoit.

 

 

Le mercredi 23 juin dernier, le ministre de la santé, Guy Patrick Obiang Ndong effectuait une visite inopinée au Centre hospitalier régional de Melen (CHRM) pour s’imprégner du fonctionnement de cet établissement sanitaire. Grande a été sa surprise de constater la mauvaise gestion de ce centre hospitalier par le directeur général et ses collaborateurs.

 

 

Très déçu, le membre du gouvernement a donc décidé de les sanctionner, en suspendant leurs émoluments. Une décision qui a suscité de vives réactions parmi le personnel, qui se demande s’il est de la responsabilité d’un membre du gouvernement de suspendre l’indemnité d’un DG ou le salaire d’un agent public.

 

 

Pour répondre à cette question légitime, nous avons joint un directeur central des ressources humaines (DCRH) pour nous édifier sur la question. Ce dernier qui a requis l’anonymat, affirme dans un premier temps, qu’au regard de la loi 8/91 portant statut général des fonctionnaires, un agent public fut-il directeur général, peut être sanctionné et perdre son salaire ou son indemnité.

 

 

En effet, l’article 11 de la loi 8/91 stipule que « Le fonctionnaire doit rejoindre, dès sa nomination, son poste d’affectation et assurer personnellement de façon permanente son service. Le fonctionnaire contrevenant aux dispositions ci-dessus s’expose à la privation de son traitement dans les conditions et selon les modalités précisées par voie réglementaire ».

 

 

Autrement dit, un agent public qui n’est pas permanent à son lieu d’affectation et qui n’assure pas régulièrement le service pour lequel il a été nommé, peut être sanctionné, car cela constitue une faute d’après le législateur. Et  la sanction prévue est la privation du salaire ou de l’indemnité. Ce qui nous permet donc de mieux comprendre la décision du ministre de la santé, Guy Patrick Obiang Ndong  visant la suspension de l’indemnité du DG du CHRM et le salaire de ses collaborateurs.

 

 

Si le DG du CHRM peut se conforter d’être régulièrement à son poste d’affectation, il n’en demeure pas moins qu’il n’assure pas convenablement le service pour lequel il a été nommé, c’est-à-dire la bonne gestion du centre hospitalier. Et d’après l’article 15, il est donc responsable des conditions exécrables dans lesquelles se retrouve l’hôpital.

 

 

« Tout fonctionnaire, quelque soit son rang dans la hiérarchie, est responsable des tâches qui lui sont confiées, ainsi que des tâches qu’il est appelé à confier à ses subordonnés », rappel l’article 15 de la loi 8/91.

 

 

Parmi les conditions déplorées par le membre du gouvernement et qui ont motivé sa décision, il y a entre autres, le manque d’alimentation en électricité et en eau potable, l’obsolescence du plateau technique, la mauvaise gestion des déchets biomédicaux et des recettes de l’hôpital. Mais aussi, l’absence régulière et injustifiée du personnel soignant de leurs postes d’affectation.

 

 

S’agissant du personnel soignant, on sait qu’au Gabon, il déserte les structures sanitaires publiques où il a été affecté, pour les établissements privés où il est mieux rémunérés. Foulant aux pieds l’article 8 qui déclare qu’ « Il  est interdit à tout fonctionnaire d’exercer une quelconque activité privée lucrative de nature préjudiciable au service public. Le fonctionnaire contre lequel il aura établi qu’il se livre à de telles activités sera mis en demeure de les cesser dans un délai d’un mois à l’expiration duquel il sera mis en disponibilité d’office, s’il continue à les exercer ».

 

 

Par ailleurs, s’il est clairement établi qu’un agent public ou un DG d’un établissement étatique peut être sanctionné et perdre sa rémunération ou indemnité, il est aussi évident d’après notre DCRH, qu’un membre du gouvernement peut dans une certaine mesure, sanctionner un agent public ou un DG et suspendre son salaire ou indemnité.

 

 

Selon les explications du DCRH qui a requis l’anonymat, un membre du gouvernement est responsable du bon fonctionnement d’un département ministériel et des entités sous tutelle. Dès lors qu’il y a un dysfonctionnement, il est de sa responsabilité de prendre les mesures qui s’imposent dont la suspension du salaire ou de l’indemnité d’un agent public, pour régler le problème. Pour ce faire, il doit saisir le DCRH de son département ministériel, précise-t-il.

 

 

Toutefois, indique notre source, pour des sanctions majeures à appliquer aux fonctionnaires indélicats, le membre du gouvernement n’a d’autre choix que la convocation d’un conseil de discipline. C’est du moins ce que stipule l’article 28.

 

 

« Des conseils de disciplines sont institués dans la capitale de la République et dans les provinces, ambassades et consulats pour donner des avis sur les sanctions majeures à appliquer aux fonctionnaires chaque fois que le ministre responsable, le gouverneur de province ou le chef de mission diplomatique ou consulaire estimera que la faute commise doit entraîner une sanction majeure aux termes de l’article 129 ci-dessous », peut-on lire.

 

 

Pour notre cas de figure, il s’agit bien des sanctions mineures prévues à l’article 129 de la présente loi, que le ministre de la santé, Guy Patrick Obiang Ndong a infligé au DG du CHRM et à ses collaborateurs. Un exemple que les autres membres du gouvernement devraient suivre pour un meilleur rendement de l’administration publique et des entités sous tutelle.

 

 

James RHANDAL

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